Le vélo est le nouveau romantisme (Ep.13)
#SurMaRoute
Cette histoire est initialement parue sur Twitter le 13 décembre 2018
#SurMaRoute #Velotaf mon parcours est assez long, je profite souvent de moments calmes, et d’autres nettement moins. Ce matin fut unique.
Le froid est là, bien sec, je dévale la pente à la sortie de chez moi, j’atteins les 45 km/h sans pédaler. Il y a une bande cyclable, que je n’emprunte pas à cet endroit, l’emportiérage serait fatal, et la bande est souvent grasse et pleine de feuilles.
Peu voire pas d’autos, le tour de cou remonté sous le nez, la visière du casque baissée, je ne perçois le froid que sur un centimètre carré de peau nue. Le buste sent enfin le froid, quand la route remonte, et j’ajuste mon pédalage pour me réchauffer.
L’auto derrière reste à bonne distance sans faire vrombir son moteur, je me cale sur la bande cyclable pour la montée, il me dépasse en douceur. Je la rattrape dans son bouchon au feu. Je passe le #CLPCF au feu rouge.
Au feu suivant, je m’arrête à côté d’un cycliste qui attend le feu vert. Un speed bike. Immatriculé !!! Pas de voitures bruyantes, une vision de science fiction. Il file Nouvelle descente. Séparateur central, pas de bande cyclable, je me cale au milieu. Personne derrière.
J’ai plusieurs points d’entrée possibles sur la #CouléeVerte. La nuit a été courte, je vais y entrer assez vite, pour préserver un peu de calme. J’y suis seul, je passe les petits creux, les petites bosses à un rythme moins rapide qu’à l’habitude.
Je jouis de cette véritable solitude. De l’absence de bruit, d’activité.
Je ressors rue Perrotin, après être bien passé sur la boucle de comptage, personne, pas un bruit. Avenue de la république, je glisse le long du Technicentre. Le feu au loin est rouge, je laisse l’élan me porter. En silence.
Un bruit curieux de pneus qui me double. Ce sont les gros crampons d’un VTTAE qui me double. Puis une trottinette électrique me passe. Ils ne s’arrêteront pas au feu. Je pose pied à terre, à côté d’une moto qui attend.
Flashback. C’est exactement la même Ténéré avec laquelle j’ai parcouru plus de 25 000 de km de pistes africaines. Je lève un pouce, on se sourit. Je pars devant au feu vert.
Descente tranquille au croisement du Tram. Trois voitures au feu rouge. Une moto sur la DSC. Je me cale derrière lui, et lui tapote le garde boue du bout du pneu. J’aime bien. C’est une sensation extrêmement stressante pour un 2RM à l’arrêt.
Il ne me voit pas dans ses rétros, quand un confrère arrive en face, et lui demande si ça ne le gêne pas d’être là. Un autre arrive immédiatement derrière. Le ton monte. Un peu. Je m’apprête à descendre et lui tomber dessus comme un essaim d’abeilles.
Le feu passe au vert. Sur le boulevard Caleminat, je roule sur la route. Rattrape un immense gaillard, sur un magnifique vélo. Je le détaille. Un VSF à disques, Nexus à chaîne. Je lui signale qu’elle est bien détendue.
Il s’en excuse comme si c’était une faute. Eh, tu n’auras pas d’amende pour ça lui dis-je. Il regarde mon vélo. Le même. A la patte d’oie, il file vers la station du Transilien. On lève très haut le bras pour se souhaiter bonne route.
Les rues de Paris sont étrangement calmes, très peu de voitures. Un silence apaisant. J’arrive rue Dauphine que j’ai pour moi tout seul jusqu’aux quais. La Seine me porte au dessus de ses bras.
La quiétude me fait me lever sur les pédales et regarder au dessus du parapet. En dessous, les voies sur bers, et leurs lucioles vélocypediques filent comme moi. L’un d’entre eux lève les bras au ciel en V, une victoire d’étape. Je souris.
Les travaux de la rue du Pont Neuf sont bientôt achevés. Et ne reste plus qu’à y dérouler un joli tapis de bitume. rue du Louvre. Personne. La dame au gilet jaune qui fait traverser les enfants est au rendez vous.
Visage neutre, ni chaud, ni froid, juste là. Sans impatience. Au croisement de la rue de Cléry, le camion de déménagement me force le passage. Le signe de la main du conducteur évite juste à temps le remplissage du bidon à colère.
Rue Montmartre, absolument personne, les livreurs de bouteilles, peuvent travailler tranquilles, J’aperçois un vélo qui me paraît bien long. Porte enfant à l’arrière avec un mouflet. Au feu de Cadet, je reconnais un VanMOOF.
Oh un VanMoof dis-je tout haut. Son pilote me regarde. Sourire. J’attaque la dernière montée. Rochechouart. Je n’aurai quasiment pas monté le grand plateau aujourd’hui. Et me dis que j’ai bien pris mon temps.
Dernier virage, à un moment où d’habitude je me remets à danser, pour enfin arriver. Je poursuis sur mon allure tranquille et distingue ce tag sur le passage piéton.
Flashback. Il me renvoie aux années de lycèe. L’Oulipo, Queneau et ses recueils : Courir les rues, fendre les flots, battre la campagne. Le planton m’ouvre le passage PMR, Bonjour, Merci.
Les vélos de Philippe et Carole sont déjà là. Je pense à Bruno qui se fait plaisir aujourd’hui en allant à Pantin par le Canal. Je suis seul à la salle de sport, pour la douche, et me remémore. Le soleil pointe, les toits de zinc sont encore givrés.